Réclamer notre pouvoir et notre place : le rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées

Réclamer notre pouvoir et notre place

Le rapport final de l’Enquête nationale révèle que les violations persistantes et délibérées des droits de la personne et des droits des Autochtones, et les abus qui en découlent, sont à l’origine des taux effarants de violence envers les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA autochtones. Le rapport en deux volumes appelle à des changements en profondeur sur les plans juridique et social afin de mettre un terme à la tragédie qui a dévasté les communautés autochtones partout au pays.
Le rapport de l’Enquête nationale renferme les vérités propres de plus de 2 380 membres de famille, survivantes de la violence, experts et Gardiens du savoir, présentées durant une période de plus de deux ans dans le cadre d’audiences publiques et de processus de consignation de la vérité tenus d’un bout à l’autre du pays. Il contient 231 appels à la justice distincts s’adressant aux gouvernements, aux institutions, aux fournisseurs de services sociaux, à l’industrie, et à l’ensemble des Canadiens et Canadiennes.
Comme l’indique le rapport final, les témoignages des membres de famille et des survivantes de la violence ont fait état d’un contexte marqué par les traumatismes multigénérationnels et intergénérationnels et par la marginalisation sous forme de pauvreté, de logement précaire ou d’itinérance et d’obstacles à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé et au soutien culturel. Les experts et les Gardiens du savoir ont parlé des politiques coloniales et patriarcales qui ont éloigné les femmes de leur rôle traditionnel dans les communautés et au sein de la gouvernance et diminué leur statut social, les rendant ainsi vulnérables à la violence.


Un rapport complémentaire : Québec

L’Enquête nationale dépose en même temps un rapport spécifique au Québec afin d’accorder une attention particulière au problème de la violence envers les femmes et les filles autochtones dans cette province. Le rapport souligne des enjeux particuliers comme la barrière de la langue, les services de santé et les services sociaux fournis par des congrégations religieuses, de même que les interactions entre les Autochtones et les services de police provinciaux.

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Établissement d’un nouveau cadre
La section 1 du rapport, composée des chapitres 1 à 4, situe le contexte global qui sera utile aux lecteurs en ce qu’il leur permettra de comprendre l’information présentée dans les sections ultérieures du rapport. Dans la section 1, nous traitons du rôle des relations, des droits de la personne et des peuples autochtones et de l’histoire de la colonisation, ainsi que de la façon dont chacun de ces contextes peut éclairer notre compréhension du problème que représente la violence envers les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA métisses, inuites et des Premières Nations.
Chapitre 1 : Mettre l’accent sur les relations pour éradiquer la violence
Chapitre 2 : La reconnaissance du pouvoir et de la place des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA autochtones
Chapitre 3 : Favoriser la responsabilisation grâce aux instruments des droits de la personne
Chapitre 4 : La colonisation : un outil d’oppression fondé sur le genre
Le droit à la culture
L’histoire de la colonisation a modifié les liens des Inuits, des Métis et des Premières Nations avec leur culture et leur identité par le biais de politiques ciblées visant à rompre leurs liens culturels et leurs liens avec la parenté. Ces atteintes à la culture, qui englobent les pensionnats indiens, la rafle des années 1960 et d’autres politiques d’assimilation, constituent les points de départ pour d’autres formes de violence que connaissent aujourd’hui les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA autochtones.
Le droit à la santé
La violence coloniale dirigée envers la pratique culturelle, la famille et la communauté crée des conditions qui augmentent les possibilités que se produisent d’autres formes de violence, y compris la violence interpersonnelle, par l’entremise de ses incidences distinctives sur la santé physique, mentale, émotionnelle et spirituelle des Inuits, des Métis et des Premières Nations. Les membres de famille et les survivantes ont raconté, leur histoire au sujet des problèmes de santé que leurs proches disparues ou assassinées ou eux-mêmes ont dû affronter ainsi que leurs expériences des services de santé. Ils ont expliqué que, pour contrer le problème de la violence envers les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA autochtones, le droit à la santé doit faire partie de l’équation.
Le droit à la sécurité
Les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA métisses, inuites et des Premières Nations doivent vivre avec la menace presque constante qui pèse sur leur sécurité physique, émotionnelle, économique, sociale et culturelle. Alors que les familles, les survivantes et d’autres personnes ont partagé leur vérité propre dans le cadre de l’Enquête nationale, il est devenu manifeste que, pour la majorité des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA autochtones qui vivent dans différents milieux et régions, la sécurité est un facteur clé et la violence envers les femmes et les filles autochtones est un problème qui peut et qui doit être réglé.
Le droit à la justice
Bien qu’il faille tenir compte de nombreux éléments pour en arriver à comprendre les expériences des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA métisses, inuites et des Premières Nations au sein du système de justice, ce chapitre examine plus en détail les expériences des familles des proches disparues et assassinées. Nous nous penchons aussi sur ce que nous ont révélé les survivantes de la violence à propos de leurs expériences avec la police, le système judiciaire et le système correctionnel. Ces rencontres mettent en évidence les coupures brutales qui existent entre les Autochtones et les systèmes de justice, et qui compromettent leur droit fondamental à la justice.
Projet d’analyse judiciaire des documents

Dans leur grande majorité, les familles qui ont témoigné devant l’Enquête nationale cherchaient des réponses aux failles perçues dans les enquêtes sur la perte de leurs proches. Elles ont évoqué les diverses façons selon lesquelles elles estimaient que les services de police avaient manqué à leur devoir d’enquêter correctement sur les crimes commis contre elles ou leurs proches, ce qui a finalement entraîné l’impossibilité d’obtenir justice au sein du système existant et de tourner la page.

En réponse, l’Enquête nationale a mis en place le Projet d’analyse judiciaire des documents (PAJD), englobant deux équipes chargées d’examiner les dossiers des services de police et d’autres dossiers institutionnels connexes. Une équipe a examiné des dossiers de la province du Québec, tandis que le deuxième groupe a examiné des dossiers des services de police de l’ensemble des provinces et territoires du reste du Canada. Dans le présent résumé, lorsque nous mentionnons l’équipe d’analyse judiciaire des documents, nous faisons référence à ce deuxième groupe en particulier. Les informations et recommandations de l’équipe d’analyse judiciaire des documents pour le Québec figurent dans le rapport supplémentaire spécifique au Québec de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées. Le PAJD
visait à relever d’éventuels obstacles ou problèmes systémiques ainsi que des lacunes concernant la protection des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA autochtones. Il avait également pour objectif de formuler à l’intention de l’Enquête nationale des recommandations sur les causes systémiques de la disparition et des meurtres des femmes et des filles autochtones.

Au cours du projet, l’équipe d’analyse judiciaire des documents (EAJD), chargée d’examiner les dossiers hors du Québec, a obtenu et revu 174 dossiers et 35 études et rapports antérieurs sur les services de police concernant les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA autochtones, et analysé de l’information accessible au public.